1. Définitions et rappels
1La transcription sémio-diplomatique est une méthode d’édition imprimée des textes manuscrits. Dans cette appellation, l’adjectif sémio-diplomatique comporte un jeu de mots. Il suggère le recours à la sémiotique tout en évoquant à demi-mot le syntagme semi-diplomatique, qui peut être glosé par ‘à moitié diplomatique’, ‘en partie diplomatique’, ‘diplomatique mais pas trop’.
2Parce que ma pratique de cette méthode se limite à l’édition des sciences du langage, je restreindrai cet exposé au domaine de la linguistique.
3Diplôme vient du grec δίπλωμα (díplôma), ‘plié en deux’, d’où ‘passeport’, et par extension ‘document officiel’, ce qui ne caractérise pas le papyrus roulé en volumen mais le parchemin qui supporte la pliure sans casser. Cette particularité, découverte comme le rapporte Pline l’Ancien au iie siècle av. J.‑C. à Pergame (lat. pergamena ‘de Pergame’ > fr. parchemin), est à l’origine du codex composé de peaux pliées en deux puis cousues par cahiers de quatre (soit huit feuillets inscriptibles recto-verso, seize pages). Cahier, du lat. quadernum ou quaterio, signifie originellement ‘par quatre’.
4La diplomatique, substantif féminin, se définit comme la « science ayant pour objet les diplômes, chartes et autres documents officiels, leur authenticité, leur intégrité, leur âge et leurs variations au cours des temps »1. Quant à l’adjectif diplomatique, il est spécialement attaché à la notion de « transcription de document ».
5La pratique de la transcription diplomatique a notamment pour origine les chartriers du Moyen Âge et de l’Ancien Régime, recueils de chartes (autrefois chartres) et de copies de chartes, actes notariés et autres pièces administratives et judiciaires attestant des propriétés, rentes et bénéfices liés aux biens fonciers de la Couronne, de l’Église et de la noblesse ainsi que des villes franches et des terres « de franc alleu ». Composés à partir d’archives pour le compte des propriétaires de ces biens et titulaires de ces droits, ces recueils avaient pour but de les protéger contre toute contestation, revendication ou éviction pouvant naître du mauvais état physique des documents originaux, parfois fort anciens, qui en faisaient foi. Comme on peut bien le penser étant donné l’importance des enjeux, chaque signe comptait, notamment du fait des évolutions de la langue juridique. Ce genre de documents excluant les gloses, toujours sujettes à discussion, les copies se devaient d’être les plus fidèles possible. Les vieux manuscrits cédaient ainsi la place à des manuscrits plus jeunes, une vieille copie à une copie nouvelle – je n’ose parler de textes sources et de textes cibles. L’intention de perfection n’était pas toujours suivie d’effet, de sorte qu’il y eut des différences entre le prévu et le réalisé. Mais mon propos n’est pas là. L’important est qu’on a longtemps eu affaire aux mêmes supports – parchemin puis papier –, aux mêmes plumes d’oie et aux mêmes encres de noir de galle d’Alep ou d’Arménie, même si la ponctuation de page (rubrication, alinéation, nombre de colonnes, longueur des lignes) changeait ; changeaient aussi les types d’écriture (cancellaresca cursiva ou formata, quadrata, rotunda, bastarda, etc.) ainsi que les « scriptoriums » et les « mains » des scribes et copistes, mais en aucun cas il n’y avait de changement intersémiotique dû au passage de l’écriture manuscrite à la typographie2.
6Manuscription et typographie sont deux modalités de l’écriture fort différentes l’une de l’autre. Décrire cette différence, c’est rendre compte de l’hiatus existant entre deux sémioses. Transférant du texte d’une sémiose (le manuscrit) à l’autre (l’imprimé typographique), la transcription diplomatique moderne, scientifique, – du type de celle qui permet de publier les avant-textes des grandes œuvres dont on possède les manuscrits d’auteur3, – est confrontée à la différence entre le ductus – au sens de mouvement, de dynamisme – de la plume d’oie dont toutes les valeurs sont continues et constituent des variables4, et la composition typographique dont toutes les valeurs sont discontinues, désormais numériques. C’est pourquoi le passage du texte écrit à la main vers la forme imprimante typographique constitue une opération sémiotique. C’est aussi pourquoi on peut à bon droit parler à ce sujet de transcription sémio-diplomatique, dès lors que ladite transcription, loin d’être analogique5, est formulée rigoureusement selon des conventions permettant de remonter de l’imprimé vers le manuscrit. Encore une telle remontée n’est-elle pas toujours assurée ; il en va d’ailleurs de même en traduction, pour les mêmes raisons : comme la traduction, la transcription impose des choix. Bien évidemment la qualité de la transcription dépend du caractère rationnel et systématique de ces choix. Disons tout de suite avant d’y revenir plus loin que le principe en est le suivant : à chaque écart significatif du manuscrit doit correspondre un écart analogue dans la composition typographique.
2. Questions de déchiffrage
7Le premier de ces écarts est la lettre, définie par son rang dans le cadran de l’alphabet (Harris, 1994), et ses compléments diacritiques, numériques et ponctuationnels. L’influence réciproque de la modalité manuelle et de la modalité mécanique de l’écriture les ayant amenées à se simplifier dans le courant des xve et xvie siècles (Catach, 1968), ces composants de l’écriture sont aujourd’hui fort heureusement communs au manuscrit et à l’imprimé. Les vraies difficultés sont ailleurs : d’abord dans les strates diachroniques de la textualité sensibles (pour l’essentiel) sous forme de ratures, surcharges, additions et déplacements, puis dans les conventions de mise en page.
8Parce que les langues anciennes (et les états anciens des langues actuelles) ne nous sont accessibles que par les manuscrits, la diplomatique moderne est liée à la philologie, à l’épigraphie et à la paléographie antiques, médiévales et modernes (Figures 1 et 2). Au contraire de ce qui s’est passé dans la constitution des chartriers, on rencontre dans l’établissement des textes littéraires ou classiques une part considérable d’interprétation. Ceci en quelque sorte par définition, puisqu’on n’aurait pas besoin de science si les textes anciens se donnaient à lire aussi aisément que les modernes. Pour le déchiffrement et l’établissement des textes antiques, toujours réalisés à partir de multiples copies concurrentes, cela va de soi. Dans de nombreux cas, l’essentiel du travail d’établissement a consisté à remonter à l’Urtext, ou texte original supposé, lequel – soit dit en passant – relève la plupart du temps d’un idéal mythique.
9Les problèmes de déchiffrage alphabétique peuvent être illustrés par la lecture d’un mot de Blaise Pascal : Ces trognes armées pour Ces troupes armées7. Ce cas célèbre, bien qu’anecdotique, constitue un bon exemple des difficultés posées par un texte source trouvé à l’état de brouillon (Figure 2).
10Voici la variante (“Ces troupes en armes”) aujourd’hui admise pour ce passage des Pensées :
Ces troupes en armes qui n’ont de mains et de force que pour eux, les trompettes et les tambours qui marchent au-devant et ces légions qui les environnent font trembler les plus fermes. Ils n’ont pas l’habit seulement, ils ont la force. (« Imagination », Fragment Vanité)
11Descotes & Proust commentent :
On peut aussi lire troignes (ou trognes) ou troupes armées. Sellier [considéré comme l’éditeur du texte le plus abouti des Pensées] donne troupes armées. L’édition Havet [1866, p. 46], suivie par celle de Le Guern, Pensées, I, p. 257, donne trognes armées. Le Guern note que le manuscrit porte troignes, et que, si l’on donne troupes, le mot armées devient inutile. [...] La difficulté avec la lecture trognes armées, c’est que trogne n’a pas de sens dans ce contexte, et que l’expression trogne armée n’en a pas non plus. Trogne, selon Furetière, est un terme burlesque qui se dit d’un visage gros et laid, ou qui est rouge ou boutonneux, comme celui d’un ivrogne. Le mot ne semble pas avoir selon Furetière de sens particulièrement militaire. Selon le Dictionnaire de l’Académie, ce terme se dit, par plaisanterie, d’un visage plein, qui a quelque chose de facétieux, et qui marque le goinfre. Il se dit aussi d’un visage rebutant. D’autre part, la trogne n’est pas armée. Le mot pris pour désigner l’homme et son équipage suppose une métonymie difficilement recevable. (Descotes & Proust en ligne, , n.p.)
12Voilà bien un travail d’édition diplomatique au sens de « Qui reproduit scrupuleusement le texte primitif d’un ouvrage » (TLFi, s.v. diplomatique), définition suivie de cet exemple très judicieux : « “S’il [l’éditeur] présente les textes sous une forme dite ‘diplomatique’, il sera conscient du fait qu’il ne rendra jamais les manuscrits de façon exacte” (Neophilologus, LXI-3, 1977, p. 338) ». En d’autres termes, le scrupule n’exclut pas l’incertitude.
13On notera qu’il est ici question de texte, c’est-à-dire de la matérialité de la succession des lettres en mots, des mots en phrases, des phrases en paragraphes, etc., qui en constitue le contenu.
14La Figure 3 montre un autre aspect du problème. Pour 24 lettres de l’alphabet (ni « j », ni « v » ne se distinguent par rapport à « i » et « u » dans le système graphique de l’époque), cette casse de Gutenberg, circa 1455, comprenait quelque 300 glyphes simples (ou types, en sémiotique peircienne, v. Arabyan, 2012) dont de nombreuses abréviations et ligatures. Les abréviations reprenaient les usages des copistes du temps. Quant aux ligatures, elles étaient destinées à faciliter la justification pour imiter la mise en page des manuscrits à colonnes où toutes les lignes étaient de même longueur. Gutenberg voulait imprimer des textes qui ressemblent à s’y méprendre aux manuscrits. Il imprimait souvent sur parchemin. Ses premiers représentants à Paris furent d’ailleurs jetés en prison et accusés de sorcellerie par la Sorbonne tant les copies de la Bible qu’ils cherchaient à vendre étaient identiques – ce qui ne pouvait être que l’œuvre du Diable !
15La question du transfert du manuscrit à l’imprimé est d’ailleurs présente dans l’invention de l’imprimerie elle-même, celle-ci étant née de l’idée de reproduire l’écriture manuelle à plusieurs centaines d’exemplaires par un procédé mécanique.
16L’original manuscrit de ce qui a été édité sous le nom de Pensées de Pascal était formé de notes personnelles jetées sur un millier de feuilles de papier de tous formats, souvent découpées et recollées, classées en 27 liasses par Pascal lui-même en vue de la composition d’un traité d’apologétique que, décédé à l’âge de 39 ans, il n’a pas eu le temps de mener à terme. Cela dit, dès le xviie siècle, ses éditeurs ont été confrontés non pas à un manuscrit édité au sens médiéval (c.-à-d. soigneusement calligraphié pour être le plus lisible possible), mais à un manuscrit au sens post-gutenberguien de brouillon destiné à la seule lecture de l’auteur et le cas échéant de ses proches. Il y a en effet manuscrit et manuscrit selon qu’on a affaire à un brouillon (du type « notes de travail », Figure 5) ou à un projet abouti en vue de l’édition (Figure 8). Le manuscrit de travail peut être difficilement déchiffrable, il peut même être illisible pour qui n’en est pas l’auteur. Quant au manuscrit d’édition, ce peut être soit le manuscrit médiéval calligraphié dont on vient de parler10, soit le brouillon « passé au propre » dans une écriture soignée destiné à la lecture d’un ami ou d’un imprimeur (et sa variante, le dactylogramme tapé à la machine à écrire).
17Les problèmes posés par l’édition typographique des textes manuscrits commencent par les questions de déchiffrage11. Je supposerai celles-ci résolues et me limiterai dans ce qui suit à ce qui concerne deux plans plus strictement sémiologiques : la diachronie de la rédaction et la ponctuation textuelle.
3. Implications, applications
18J’ai dit plus haut que le principe de la méthode sémio-diplomatique est qu’à chaque écart significatif du manuscrit doit correspondre un écart analogue dans la composition typographique.
19Cette notion d’« écart » vaut aussi pour la copie d’un texte manuscrit vers un autre manuscrit comme d’un texte imprimé vers un autre texte imprimé. Voyez le cas des citations dans les articles scientifiques (par exemple de linguistique). Il est curieux de voir que certains collègues respectent dans leurs citations l’alternance majuscule vs minuscule des imprimés qu’ils reproduisent : lorsque la citation correspond à une phrase (ou à plus d’une phrase), commence par une majuscule et vient en exergue, pas de problème : à la majuscule citée correspond une majuscule citante. Mais si la citation de la même phrase vient dans le texte courant après une virgule ou un deux-points, les mêmes collègues changent la majuscule de la source en une minuscule placée entre crochets droits, convention de correction signalant un remplacement. Or si j’en juge par le § 271 du Bon Usage de Grevisse, dans cette position, le remplacement de la majuscule par une minuscule est une hypercorrection : en effet, la phrase citée reste une phrase et doit conserver la majuscule, le guillemet ouvrant qui précède immédiatement suffisant à marquer le passage du statut de texte citant à texte cité et dispensant de tout autre avertissement au lecteur. Si a contrario le texte cité commence en milieu de phrase dans la source et se retrouve en exergue dans le texte cité, les mêmes collègues mettent une majuscule initiale entre crochets là où ils pourraient laisser la minuscule – notamment derrière [...] – pour marquer la rupture de construction. Or, dans tous les cas, il est de bonne pratique de laisser au texte cité le « profil » typographique du texte source.
20Les descriptions sans exemples étant comme on voit difficiles à suivre, je développerai les notions qui suivent dans divers cas pratiques. Ces cas seront loin de couvrir la totalité des problèmes possibles et imaginables, dans la mesure où les éléments micro- et macrotypographiques de composition d’une page imprimée permettent des centaines de combinaisons.
21Entre manuscrit de travail et manuscrit d’édition, il y a le manuscrit destiné à des intimes suffisamment proches pour qu’ils connaissent l’écriture et la déchiffrent en s’aidant du contexte (c.-à-d. de la situation de communication au sens le plus jakobsonien du terme, lorsque le contenu du message est tout entier présent dans les circonstances extérieures). La Figure 4 en donne un exemple tiré de la correspondance privée d’Antoine Meillet12.
Envoi d’A. Meillet // 65 rue d’Alésia // Paris (XIV) // Moulins, 26 avril // Mon cher Louis, // J’ai bien reçu votre lettre, qui m’a été / renvoyée de Châteaumeillant. Nous voici en route / pour rentrer à Paris, demain dimanche. // J’ai laissé votre femme et vos enfants en bel / état. Dédé est bien amusant en ce moment. / Il regarde tout, parle de tout. C’est très gentil. // J’ai trouvé ma grand mère en très <bon> état, en train / d’aller à ses 99 ans en août prochain. // Votre bien dévoué. // A. Meillet.
22Dans ma transcription, la barre oblique unique indique un retour à la ligne contingent : la largeur de l’espace imparti à la correspondance dans la moitié gauche de la carte postale ne permet pas de prolonger la ligne d’écriture au-delà de la moitié marquée par un filet double imprimé, ce qui oblige Meillet à « passer à la ligne » sans alinéa. La barre oblique double indique un retour à la ligne volontaire, ce que marque l’alinéa, qui crée un nouveau paragraphe. Il aurait été possible d’employer une barre oblique triple pour indiquer les sections, c’est-à-dire les intervalles verticaux blancs ou vides supérieurs à la ligne écrite et à l’unité paragraphe : il y en a deux occurrences, l’une avant et la seconde après la mention « Mon cher Louis ». On comprend que les coordonnées de l’expéditeur inscrites en biais (en biais pour les différencier du message proprement dit) dans l’intervalle supérieur ont été ajoutées lorsque Meillet, arrivé en bas, s’est aperçu qu’il n’avait plus de place pour l’écrire sinon en haut. Une transcription plus complètement diplomatique aurait pu noter cet ajout en biais entre soufflets doubles : par convention, les premiers soufflets ouvrants et fermants signifieraient « ajout » et les seconds soufflets ouvrants et fermants signifieraient « en biais ». Cependant, une précision de ce type serait sans intérêt pour le lecteur de l’ouvrage dans lequel la carte serait reproduite. Elle ne possède après tout qu’une valeur qu’on pourrait dire « purement documentaire » : (a) elle date l’adresse de Meillet rue d’Alésia ; (b) elle témoigne de son intérêt pour un cadet, employé occasionnel de la famille devenu « poilu », combattant engagé au front, dans les tranchées de la Grande Guerre ; (c) quant à la grand-mère (maternelle) âgée de 99 ans – née en 1817 à Moulins – Meillet la cite dans un article de 1909 (voir Meillet, 2015 : 228) en exemple de la désuétude du passé simple en Bourbonnais.
23L’élément essentiel à noter ici concernant la transcription sémio-diplomatique d’un manuscrit, c’est que le but en est la publication du texte sous une forme composée typographiquement de façon à servir de source de première main (je souligne cet aspect paradoxal du but poursuivi par l’éditeur scientifique du texte) à des chercheurs qui le citeront.
24En d’autres termes, une transcription trop fidèle ne sera pas suivie : bien au contraire, elle ne sera pas recopiée fidèlement mais adaptée au but de sa citation par le chercheur citant.
25J’en donnerai pour exemple ce qui s’est produit avec le Baudelaire de Benveniste, dossier d’archives manuscrites établi et transcrit par Chloé Laplantine et publié chez Lambert-Lucas en 2011.
26C. Laplantine a symbolisé les retours à la ligne contingents (sans alinéas) de ces textes à plus de 90 % linéaires par une barre oblique, tandis que les alinéas originaux ont été reproduits. L’idée était de conserver quelque chose du format et du rythme de ces notes, tous les supports utilisés par Benveniste n’étant pas de même sorte : cela va du dos de carton d’invitation ou de la carte de visite de grande taille au feuillet standard de son époque, 21 x 27 cm.
27Mais quoi qu’il en soit de cette intention, seule la transcription de C. Laplantine (Benveniste, 2011) reproduit ces barres obliques. Aucune des autres études publiées à propos du Baudelaire, notamment dans le numéro de Semen qui lui a été consacré, ne les reproduit : tous nos collègues ont jugé – à juste titre sans doute – qu’elles n’apportaient rien à la compréhension du contenu du texte ou qu’elles gênaient la lecture sans équivaloir à la transcription exacte du découpage en lignes.
28La Figure 7 montre que tout en respectant, dans un souci de reproduction fac-similaire, les retours à la ligne du manuscrit, J.-M. Adam ignore l’alinéa et l’alignement à gauche présents dans le fac-similé.
Que la langue poétique n’a pas de dénotation situe le problème / au
niveau non du signe mais du discours entier ou mieux / de la
fonction du poème en tant que réalisation d’un / certain exercice de la langue poétique. C’est le discours
entier / qui révèle la nature de la langue dans laquelle il est
construit.
29En second lieu, il réintègre dans le texte le syntagme « de la fonction », barré par Benveniste : il faut lire que le problème de la langue poétique se situe « au niveau du discours entier ou mieux du poème », et non « *de la fonction du poème ».
30Troisième point à relever, J.-M. Adam omet que Benveniste a souligné le mot exercice, qui devrait donc apparaître en italiques dans sa copie. Cette omission n’est pas non plus sans conséquence sur la signification du texte : dans « [le poème est la] réalisation d’un certain exercice de la langue poétique », Benveniste souligne exercice pour insister sur le sens technique du mot. Cette insistance a sans doute à voir avec la suppression de « de la fonction ».
31Mon propos n’étant pas de revenir sur la publication des inédits de Benveniste, je n’irai pas plus loin13. Cela dit, l’édition critique du Baudelaire de Benveniste par C. Laplantine, qui a été faite pour être citée, ne devrait pas être altérée par ceux et celles qui la citent, mettant ainsi en circulation des variantes.
4. L’édition des Anagrammes homériques
32Je développerai pour terminer la « note de l’éditeur » (p. 49-51) qui présente les conventions de transcription adoptées dans l’édition Testenoire des Anagrammes homériques de Ferdinand de Saussure (Saussure, 2013 ; Testenoire, 2013).
33Ces conventions seront illustrées par les deux pages en regard qui ont été données par Testenoire (p. 40 et 41) en exemple de l’état du manuscrit saussurien et de son rendu typographique. Saussure ayant composé son manuscrit comme s’il le destinait à l’impression – pour le faire lire par un tiers tel qu’Antoine Meillet – en fac-similé manuscrit de ce qu’aurait été l’impression, le transfert sémio-diplomatique du manuscrit vers un rendu typographique n’a posé aucune difficulté.
34C’est cette anticipation dans son manuscrit, par Saussure, des normes de l’imprimerie, qui fait de ce cas un bon exemple d’application de la méthode sémio-diplomatique elle-même.
35Les éléments continus caractéristiques de l’écriture manuscrite se prêtent mal – on l’a vu – à la reproduction typographique. Non seulement la page imprimée ne peut pas transposer la dynamique de l’écriture, mais elle conduit à neutraliser la variation allographique (ou idiographique) et contraint à des choix. La typographie se caractérise de ce point de vue par la discrétion sémiotique, discrétion exprimable en points typographiques, avec pour règle première de mettre un minimum de moyens au service d’un maximum d’effets, tous les éléments devant en bonne règle soit s’aligner les uns sur les autres, soit être centrés.
36Seuls les signes alphabétiques, numériques et de ponctuation – y compris les accolades, dont F. de Saussure fait un usage fréquent – peuvent être imprimés sans gain ni perte sémiotique par rapport au manuscrit.
37Voici les principales modifications apportées aux formats d’écriture employés par F. de Saussure dans les Anagrammes homériques du fait de l’uniformisation rendue nécessaire par leur interprétation typographique.
4.1. Numérotation des vers
38La numérotation des vers de l’Iliade et de l’Odyssée qui constituent le corpus de Saussure présente des variations d’un cahier à l’autre du manuscrit et à l’intérieur même de chaque cahier. En l’occurrence, les numéros des vers peuvent être au format « 000 » 14, « 000. », « (000) » ou « (000.) » et venir soit dans la marge de la composition – c’est le cas majoritaire –, soit à l’alignement du bord gauche du texte, soit, plus rarement, après un alinéa. Cette variation constitue un indice diachronique : le format « (000.) » est clairement lié à la rédaction des premiers cahiers (cotes 3963/6, 7, 13, 19 et 4) et disparaît entre le début et la fin du cahier 4. Cependant, pour faciliter la citation de l’édition Testenoire, ces écarts n’ont pas été retenus comme pertinents pour la compréhension de l’ouvrage. Les douze formats possibles ont été ramenés à un seul, « 000. », empiétant en marge (par un alinéa en sommaire) de façon à aligner le début des vers sur le texte courant.
4.2. Ponctuation, guillemets
39La ponctuation générale du manuscrit (virgule, deux-points, point-virgule, point, etc.) a été strictement respectée. Cependant, Saussure cumule les points d’abréviation et les points de phrase, écrivant par exemple « etc.. », avec un point pour abréger et cætera et un point pour achever la phrase. Nous avons corrigé en « etc. » selon l’usage.
40F. de Saussure dessine les guillemets ouvrants en doubles virgules basses « „ » et les guillemets fermants en doubles virgules hautes « ” », ces dernières étant la plupart du temps orientées dans le même sens que les premières « ” » et non en sens inverse « “ » comme le voudrait le code typographique (en l’occurrence allemand). Pour des raisons de cohérence codique, on a corrigé « ” » en « “ ». Deux ou trois occurrences de guillemets français ont été reproduites sans changement.
4.3. Trait d’union « - », tiret d’incise « – », tiret long « — »
41Trait d’union et tiret d’incise ont été uniformisés après examen de toutes leurs occurrences. Le trait d’union « - » (quart de cadratin) a été employé chaque fois que le cotexte l’imposait pour séparer des lettres ou des morphèmes, marquer préfixes et suffixes, etc., ceci dans le grec.
42Saussure emploie un tiret de longueur moyenne dans le commentaire en langue française tantôt au sens de trait d’union, tantôt au sens de tiret d’incise ; ce tiret moyen aurait pu être représenté par le tiret demi-cadratin « – », mais il apparaît que Saussure emploie aussi bien le tiret long « — », tiret cadratin, pour ouvrir et fermer une incise, renforcer une virgule, un point-virgule ou un point, énumérer des propositions dans la phrase ou mettre fin à un développement. Nous avons utilisé ce tiret long dans tous les cas où le trait d’union ne s’imposait pas de sorte que le tiret demi-cadratin n’est pas employé.
43Certains paragraphes sont introduits par des tirets ondulés placés en saillie ou en retrait. Nous avons réduit le nombre des formes à trois : courte, moyenne, longue : « ~~~ », « ~~~~ », « ~~~~~ », c’est-à-dire trois, quatre ou cinq tildes selon la longueur du tiret.
4.4. Soulignements et divisions
44Les soulignements et les divisions sont de deux formats : soit rectilignes « ——— », soit ondulés « ~~~~~ ». En soulignement, s’agissant de titres ou de citations, la longueur du filet est généralement égale à celle des mots soulignés. Dans l’édition Testenoire, contrairement aux usages, les soulignements n’ont pas été rendus par des italiques. De fait, les italiques sont exclues de la transcription.
45En division, les filets sont de longueur peu ou prou proportionnelle à la hiérarchie des sections, souvent redondante de l’emplacement, en haut, en bas ou en milieu de page, c’est-à-dire en début, en fin de section ou pour commencer une nouvelle section sans changer de page, auquel cas le filet va d’un bord à l’autre de la feuille. Toutes les dimensions ont été réduites à trois longueurs pour distinguer autant de cas de figures : petite, moyenne et grande division, soit approximativement un tiers, deux tiers et trois tiers de la largeur de la feuille :
——————————
———————————————————
———————————————————————————————
46Les séparations ondulées ont subi la même réduction conventionnelle en petite, moyenne et grande division :
~~~~~~~~~~~~
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
47Ces filets sont toujours centrés.
48Les tirets droits d’un ou deux traits de plume qui, dans le grec, abrègent les citations, ont été rendus par des filets maigres (c.-à-d. d’une épaisseur de 0,25 point typographique) de longueurs analogues, calculées sur le nombre de caractères concernés figurant dans la ligne précédente.
49Saussure souligne parfois de deux traits les mises en relief renforcées ou exceptionnelles à rendre en caractères gras. Il n’emploie pas à cette fin la convention du code typographique actuel (v. p. ex. Gouriou, 1990) qui est le soulignement ondulé. Cette marque existant en traitement de texte, elle a été conservée.
4.5. Profondeur des indentations
50Les Figures 8 et 9 montrent un dernier problème général15 de transcription : le manuscrit de Saussure n’a pas de marges : l’écriture y court d’un bord à l’autre du papier ; en quelques occasions (sur le bord droit des pages droites) elle a même pu sortir un peu du support. Cependant, la marge gauche est souvent libre parce qu’elle contient des alinéas en sommaire, c’est-à-dire non pas des retraits mais des saillies de première ligne. C’est notamment le cas des numéros de vers de l’Iliade et de l’Odyssée dont j’ai parlé plus haut.
51Sans aucun doute possible au vu de la qualité de la composition des cahiers, Saussure maîtrise parfaitement maquette, mise en page et orthotypographie des publications de linguistique. En dehors du grec, qu’il cite de mémoire et qui contient d’assez nombreuses fautes d’accent et d’esprit, ou du cumul des points de « etc.. » en fin de phrase, on n’a pratiquement pas de fautes à signaler.
52Il a adopté deux grands principes de ponctuation textuelle : toutes les lignes composant le texte, que celui-ci soit (localement) linéaire ou tabellaire, sont soit « au fer à gauche », soit centrées. Il remplit généralement les lignes jusqu’au bord droit des pages qui forcent la justification. Mais comme il arrive souvent dans les manuscrits de travail, il commence chaque nouveau paragraphe un peu en retrait du précédent – ceci même indépendamment de la hiérarchie des alinéas –, ce qui fait que la longueur moyenne des lignes tend à diminuer du haut en bas de la page à mesure que la justification gauche s’écarte de la marge. Ce trait d’écriture purement contingent a été neutralisé dans la transcription. C’est une des raisons pour lesquelles cette transcription n’est pas « complètement diplomatique ».
53Les quatre derniers paragraphes sont un bon exemple des problèmes d’indentation. Dans tout texte linéaire, la succession des paragraphes forme une liste simple de groupes de phrases de même rang hiérarchique, disons « de rang 1 ». Toute indentation supérieure à la valeur du retrait d’alinéa de base crée un rang 2, puis un rang 3 : les listes s’emboîtent les unes dans les autres en sous-listes, puis sous-sous-listes (au-delà, on commence à s’y perdre). Dans l’édition Testenoire, toutes les indentations successives et les marges gauche qui les suivent ont reçu la même valeur de 5 mm, quelle que soit la valeur mesurée des retraits dans le manuscrit.
54Dans la page représentée Figure 9, on a les valeurs suivantes :
Ligne commençant par | Valeur de l’indentation (du retrait) |
580. | – 10 mm (alinéa en sommaire) |
Chercher dans μώνυχας | 5 mm |
qui viendrait à peine | 0 mm (justification gauche) |
~~~~~ Soit le complexe | – 10 mm (alinéa en sommaire) + 5 mm (alignement sur Chercher) |
Mais cette figure générale | 5 mm |
1. α- | 20 mm |
Il ne reste guère à remarquer | 0 mm |
Sont en revanche donnés | 5 mm |
1° tout le groupe -ιαδ- | 10 mm |
χερμαδι ; et avec | 15 mm |
55Pratiquement tous les points de départ de ligne possibles de 5 en 5 mm, depuis – 10 mm jusqu’à + 20 mm sont utilisés dans l’ouvrage, et chacun possède sa signification conventionnelle, analogue sémiotique des différents retraits marqués par Saussure dans sa composition.
56De son côté, le centrage sert à mettre certains exemples en exergue. A contrario, d’autres exemples, notamment les plus longs, viennent au fer à gauche, et lorsque ce sont des reprises du corpus grec, ils commencent par le même numéro en sommaire que dans les débuts de chapitres.
57Tous ces formats étant strictement réguliers, ils ont en quelque sorte été reproduits en « composition fac-similé » – expression qui n’est pas si oxymorique qu’il paraît.
Conclusion
58J’ai écrit plus haut, par souci de brièveté : « Mon propos n’étant pas de revenir sur la publication des inédits de Benveniste, je n’irai pas plus loin » – sous-entendu : je ne discuterai pas la fidélité des copies imprimées par rapport aux textes manuscrits. Car, concrètement parlant, chaque travail d’édition est un cas spécifique. Quoi de comparable entre des notes de travail (Pascal) et une copie préparée comme si elle était destiné à l’édition (Saussure) ? Dans tous les cas, une édition scientifique – qu’elle soit scolaire, diplomatique ou fac-similaire – ne vise autre chose que la fidélité, l’honnêteté, la sincérité.
59La bibliographie récente des études de critique génétique portant sur les seules questions de ponctuation et de mise en pages compte des centaines de références. Le renouvellement non moins récent de l’histoire des idées (linguistiques), parallèle au développement de nouveaux axes de recherche « de terrain » ou « sur pièces », va dans le même sens : on donne de plus en plus d’importance (si ce n’est la priorité) à la production d’outils de travail fiables (sans lesquels il n’est pas de progrès de méthode) par rapport aux résultats de détail.
60La notion de « commodité d’emploi » que j’ai revendiquée pour l’édition sémio-diplomatique des manuscrits de chercheurs peut sembler, en regard du souci d’absolue fidélité, un peu trop accommodante. Elle n’est cependant pas nouvelle : depuis plus d’un semi-siècle, les éditions scolaires des classiques (voir Larousse, Hachette, Bordas, Garnier, Les Belles Lettres, etc.), fondées sur des connaissances philologiques parfaitement à jour, donnent à leurs lecteurs des textes qui fourmillent de décisions critiques... et criticables. Tout récemment encore, l’édition des Œuvres complètes de Mme de La Fayette (ou Lafayette) en Pléiade, 2014, par Mme Camille Esmein-Sarrazin, ne reproduit pas la ponctuation des éditions originales mais celle des éditions de la fin du xixe siècle où les variantes se comptent par centaines, ce qui a fait dire à Nina Catach (1989 : 215) que c’était « le plus grand travestissement de l’histoire ». L’argument en faveur de cette décision16 doit être pris au sérieux : c’est que le patrimoine culturel de l’humanité ne peut que progresser si l’on met à la portée du plus grand nombre de lecteurs le plus grand nombre possible d’œuvres, fût-ce au prix d’une légère « modernisation » ou d’un léger « lissage » des aspérités du texte. La perte est jugée de moindre importance que le gain.
61La question est donc posée de savoir dans quelle mesure une édition (voire une simple citation) scientifique est crédible du seul fait qu’elle est estampillée comme « scientifique » en raison de la notoriété de son auteur ou de son éditeur17.
- 1 Source : TLFi (toutes les références bibliographiques sont reportées en fin d’article).
- 2 La lithogravure, la photogravure et la gravure en général sont un cas intermédiaire où l’écriture manuelle peut, par report d’une surface à une autre, produire directement ou indirectement le texte à imprimer et imprimé. Seule la typographie pose un problème de reproduction de l’écriture manuelle, raison pour laquelle je préfère utiliser les mots typographique et mécanique plutôt qu’imprimé, trop générique.
- 3 Voir la publication des manuscrits des Pensées de Pascal sur penseesdepascal.fr, de ceux de Madame Bovary de Flaubert sur bovary.fr. Celle des 75 cahiers de la Recherche de Proust est en cours chez Brepols.
- 4 Les manuscrits médiévaux étaient normalisés, mais connaissaient des variantes d’écriture idiosyncrasiques de sorte qu’il est possible d’identifier les œuvres de chaque copiste à sa façon de tracer les lettres, alors même qu’il s’efforçait de neutraliser cette dimension de son travail : la norme typographique était déjà sous-jacente dans ce souci de neutralité. A contrario, dans les impressions typographiques, à partir de la fin du xve siècle et du début du xvie, seule la police et son fabricant sont repérables (en matière de casses informatiques latines, on ne connaît plus guère aujourd’hui que quelques sociétés, Adobe, Agfa, Linotype). Alors que le livre médiéval est intrinsèquement un unicum (une pièce unique), le livre gutenbergien est un polycopié industriel dont ne se distinguent plus vraiment que les rééditions.
- 5 Sont analogiques la reproduction du changement de taille de l’écriture (en dehors de l’opposition entre titraille et texte courant), celle du changement de couleur d’encre ou encore celle du passage du stylo-plume au stylo à bille ou au crayon, ce dernier pouvant lui-même changer de couleur. Les différences de support – types et formats de papier, filigranes, réglures – ne sont notées que dans l’apparat critique.
- 6 Ces minuscules font système pour une même main parce qu’elles se distinguent nettement les unes des autres dans l’alphabet. Cependant, toutes mains confondues, elles prêtent à confusion (comparez par exemple « a », « u », « v » et « s » ou encore « c », « e » et « r »). Lu de droite à gauche, ce tableau donne des correspondances de transcription du manuel vers le mécanique.
- 7 L’erreur de lecture est plus facile à commettre et à comprendre s’agissant d’un toponyme (sorte de nom propre qui vient en citation autonymique sans contexte) : le nom du département français Calvados est issu de la mauvaise lecture de Salvador (Jésus-Christ sauveur du monde) sur une carte ancienne.
- 8 Faut-il lire « Ces troignes armées » ou « Ces troupes armées » ? (cité d’après Descotes & Proust). On peut aussi écrire, les soufflets indiquant par convention un texte ajouté dans l’interligne supérieur : « Ces troignes <armées> » et « Ces troupes <armées> ».
- 9 Malgré les moyens informatiques actuels – les polices unicode couvrent la quasi-totalité des écritures du monde –, la typographie de Gutenberg n’a pas d’équivalent numérique. À qui voudrait reproduire sa Bible latine à 42 lignes de 1455, il resterait à la dessiner (v. Smith, 2013).
- 10 V. supra. Appartiennent à cette classe les manuscrits d’apparat : v. p. ex. Heidmann, 2015. J’ai tout récemment vu un manuscrit d’apparat dans le métro parisien entre les mains de trois écolières : c’était un cahier rempli de photos de classe légendées et de textes calligraphiés portant en couverture le titre « À la meilleur des maîtresses » [sic pour « meilleur » – erreur craquante qui va sûrement contribuer à l’émotion de la destinataire !].
- 11 J’en trouve un bon exemple dans ce travail d’un étudiant qui, au cours d’un exercice de transcription, a noté des articles et prépositions comme « le », « la » et « de » ou « de la » sous la forme « l. », « d. » et « d. l. », interprétant les lettres « e » et « a » de l’auteur du manuscrit comme des points abréviatifs et lisant par exemple « ds l. linguistique », « un point d. vue », « l’histoire d. l. linguistique », « tt d. suite ». Dans d’autres positions, à l’intérieur des mots, le tracé de ces lettres les donnait à lire de façon plus claire. Il va de soi que le rétablissement des lettres à la place des points a grandement facilité la lecture du texte numérisé !
- 12 Archives Foffano, dans Arabyan et Ragotn à paraître. Henri-Louis Guillot (1888-1945) a vingt-deux ans de moins qu’Antoine Meillet ; il a été élevé à la Villa Paradis, résidence de la famille Meillet à Chateaumeillant.
- 13 Les Dernières Leçons. Collège de France (1968-1969), d’Émile Benveniste, parues en 2012, contiennent des interpolations et des interprétations qui rendent l’ouvrage inutilisable en génétique des textes (v. Laplantine 2013).
- 14 Dans les notations qui suivent, les guillemets français encadrent les éléments graphiques manuscrits ou imprimés.
- 15 Faute de place et parce que ce n’est pas le but de cette présentation méthodologique, je n’entrerai pas dans le détail des problèmes particuliers, au nombre d’une bonne demi-douzaine, à savoir ce qui concerne (a) les sauts de pages ; (b) les changements de division au sein des cahiers du manuscrit ; (c) les notes de bas de page, de trois ou quatre styles différents, qui ont été conservés ; (d) l’emploi d’un signe typographique propre à l’ouvrage, H capital (et h en petite capitale pour la minuscule) tourné de 90°, servant à noter l’hiatus dans le grec ; (e) les accolades, les flèches, les points de conduite « . . . . . » et les tableaux ou passages tabulaires du texte ; (f) les conventions de notation des ratures, des segments illisibles (peu nombreux, P.‑Y. Testenoire ayant examiné les passages raturés par transparence), des ajouts ou récritures ; (g) les fameux « blancs » ou silences saussuriens ; (h) les hors-textes.
- 16 C’est aussi celui qui a prévalu chez Gallimard lors de l’édition des Écrits de linguistique générale de F. de Saussure compilés par Simon Bouquet et Rudolf Engler.
- 17 S’il s’agit d’édition critique ou de publication dans une revue scientifique, le mot édition est à prendre au sens de l’anglais editor ; s’il s’agit d’une maison d’édition, le mot est à prendre au sens de l’anglais publisher.